L’homme est alerte, vibrant et passionnant. Pendant 1h30, il réussit à tenir en haleine la salle de l’hippodrome. Pierre Péan ne se définit pas comme un journaliste d’investigation (un terme utilisé en France après l’affaire du Watergate et qu’il n’aime pas trop) mais comme un journaliste d’initiative : « je choisis mes propres sujets et j’assume le risque de me tromper », commence-t-il. Le journaliste, qui fêtera ses 74 ans en mars prochain, est originaire de Sablé-sur-Sarthe. « Toute ma famille est originaire de Bretagne et de Loire-Atlantique ».
Après des études à Angers et à Paris, il devient attaché de cabinet d’un ministre du Gabon entre 1962 et 1964. « J’y ai vu beaucoup de choses. J’ai même fait passer une lettre au Monde pour les raconter. Je n’ai su que des années plus tard qu’un journaliste m’avait vendu ». Rentré en France en catastrophe fin 1964, il se lance dans l’immobilier avant de réaliser son rêve en 1968 : devenir journaliste... « J’ai écrit à deux journaux : Europe 1 et le Monde. Seul Jacques Paoli d’Europe 1 m’a répondu : il m’a conseillé d’envoyer une lettre à l’Agence France Presse, ce que j’ai fait et j’ai été embauché dans la semaine ». Très vite, Pierre Péan s’est retrouvé grand reporter à l’Express, qu’il a quitté en 1974 pour des raisons politiques.
C’est alors qu’il a écrit son premier livre qui parlait du pétrole Pétrole, la troisième guerre mondiale. Revenir à l’écriture d’articles l’a rapidement frustré car c’est un exercice beaucoup plus limité et qui ne permet pas d’aller au bout des sujets ; il a donc commencé à écrire des livres de manière parallèle. En 1982, après plusieurs ouvrages sur le pétrole et le Moyen-Orient, il change de sujet et écrit son premier best-seller : Affaires Africaines . « J’ai eu une pression épouvantable, deux attentats et une quinzaine de procès », se souvient Pierre Péan. Il a alors monté son propre système de financement pour ses enquêtes et n’a plus fait que quelques incursions dans la presse.
Après Carnages. Les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique paru en 2010, La République des mallettes se focalise sur les financements occultes des hommes politiques et sur le mystérieux Alexandre Djouhri. L’histoire du livre a commencé au moment de l’affaire Clearstream : « je ne comprenais pas tout et Jean-Louis Gergorin y était présenté comme un corbeau. Je le connaissais et ne l’aimais pas trop, mais je trouvais que quelque chose ne collait pas… » Après l’avoir rencontré et avoir discuté avec lui, Pierre Péan, en arrive à la conclusion qu’avec le juge Van Ruymbeke, ils ont manqué de sens critique quand ils ont reçu les faux listings, sautant sur cette preuve de la corruption de certains hommes politiques. « Dans le fond de l’écran, je vois apparaître Alexandre Djouhri. J’ai été de plus en plus fasciné par ce personnage qui passe de grand voyou à familier de l’Élysée. Ses comptes sont en Suisse ».
Et de raconter le parcours de l’homme, d’un gang de la banlieue Parisienne aux plus hautes sphères du pouvoir, en passant par une amitié avec Anthony Delon, à des liens avec l’entourage de Pasqua puis avec Dominique de Villepin. Pour Pierre Péan, Alexandre Djouhri devait être un personnage important de l’affaire Clearstream. En 2003-2004, au moment où les faux listings sont parvenus au juge Van Ruymbeke, le camp Sarkozy et le camp Villepin se menaient une guerre féroce pour le contrat Mixa de vente d’arme à l’Arabie Saoudite (et surtout sa commission de 300 millions €). « C’est à ce moment-là qu’une tentative d’assassinat a eu lieu contre Ziad Takkieddine, le champion du camp Sarkozy. Depuis des années il y a beaucoup de rétro commissions, pour au moins 3 milliards €, avec beaucoup de bénéficiaires mais nous ne connaissons pas leurs noms ».
Mais alors cette histoire de mallette, ça continue ou pas ? Difficile à dire. Oui très certainement, d’autant qu’il n’y a pas encore eu de grand procès sur le sujet (même si l’affaire Karachi semble en prendre le chemin). Pierre Péan conclut : « pour moi, la meilleure façon d’arrêter tout ça, c’est la peur. En ce moment, on parle beaucoup de Karachi et ça engendre la peur; je pense que 2012 va être une bonne année sans mallette ! » Pour l’instant, Pierre Péan n’a pas encore été attaqué en justice sur ce livre.
Le reste à découvrir dans son livre : La République des mallettes, Pierre Péan
Éditions Fayard 23 €.
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